Coup d’état au Gabon : L’évolution des clichés politique.

La récente prise de pouvoir par l’armée au Gabon, dans la nuit du 29 au 30 août, a suscité des réflexions sur les circonstances qui ont conduit à la destitution d’Ali Bongo. Certains comparent ce coup d’État à celui qui a renversé Mohamed Bazoum au Niger, tandis que d’autres estiment que ces deux situations sont incomparables.

La montée en puissance des coups d’État en Afrique au cours des trois dernières années rend difficile l’évaluation de chaque cas de manière uniforme. Cependant, il est essentiel de ne pas simplifier cette question complexe.

En premier lieu, il est évident que le coup d’État au Gabon s’inscrit dans une série de renversements militaires qui ont secoué l’Afrique ces dernières années. Cela montre la fragilité des systèmes politiques et le désir de changement qui prévaut dans certaines régions.

En qualifiant le renversement d’Ali Bongo de plus acceptable, on risque de fournir un argument aux futurs auteurs de coups d’État. Cependant, il est difficile d’ignorer la singularité de la situation gabonaise. Dans un pays où une seule famille a régné pendant plus d’un demi-siècle, la chute de ce régime est difficile à regretter.

Le paradoxe est saisissant : Ali Bongo, dont la famille a dirigé le Gabon pendant cinquante-cinq ans, entre dans l’histoire avec un record peu enviable. Son troisième mandat restera le plus court de l’histoire, car il n’a duré qu’une heure tout au plus.

Comme pour Alpha Condé en Guinée, dont le renversement en 2021 a suivi sa modification de la Constitution pour un troisième mandat, cela a été un mandat de trop pour Ali Bongo. Sa propre gestion du scrutin, avec la coupure d’Internet, le couvre-feu et le refus de laisser les médias rendre compte du déroulement du vote, a suscité des soupçons de fraude. Cette confiscation apparente des suffrages, en plus de celle en 2016 au détriment de Jean Ping, a contribué à sa chute.

Pour toutes ces raisons, l’appel à la solidarité lancé par l’ancien président via les réseaux sociaux demeurera inaudible. Ali Bongo ne peut pas espérer le même soutien que Mohamed Bazoum a reçu de la communauté internationale ces dernières semaines.

Cependant, il est essentiel de rester vigilant envers les nouveaux dirigeants militaires au Gabon. Ils sont tout aussi responsables des problèmes du pays que le clan Bongo. La situation pourrait même empirer, car les enquêtes sur les biens mal acquis pourraient être rouvertes.

Enfin, la localisation géographique de ce coup d’État au Gabon, en Afrique centrale, est notable. Les précédents coups d’État se sont produits en Afrique de l’Ouest et au Sahel. Cette expansion de l’épidémie de coups d’État dans cette région soulève des inquiétudes. L’Afrique centrale est connue pour être politiquement instable, avec des dirigeants au pouvoir depuis des décennies. Les événements au Gabon pourraient inspirer d’autres acteurs politiques de la région.

En conclusion, bien que la destitution d’Ali Bongo ne suscite pas autant de sympathie internationale que d’autres renversements récents, il est important de rester attentif à l’évolution de la situation au Gabon et dans la région. Le coup d’État au Gabon pourrait avoir des répercussions sur l’Afrique centrale, une région déjà politiquement volatile.

Source : Boubacar Sanso Barry : “Gabon : un putsch pas comme les autres ?”, LEDJELY.COM, Le 30/08/2023. https://ledjely.com/2023/08/30/gabon-un-putsch-pas-comme-les-autres/